Le bobard public est-il désormais permis pour justifier les modifications de grilles de programmes sur nos antennes ? Dans son interview accordée au Monde mercredi 24 mai, Adèle Van Reeth, directrice de France Inter, affirme à propos de C’est encore nous, l’émission de Charline Vanhoenacker, que « les chiffres d’audience étaient en baisse depuis quelques années ». La réalité, elle, dit le contraire : d’1 210 000 auditeurs en 2018, l’émission est passée à 1 253 000 auditeurs lors de la dernière vague de 2023 avec plus de 100 000 nouveaux auditeurs cette saison. Entre-temps, l’émission a effectivement connu une baisse sur 2019/2020, période de confinement, avant de repartir à la hausse immédiatement, et alors que ses principaux concurrents s’effondraient perdant près de 700 000 auditeurs entre 2018 et 2023.

 

Grossière erreur ?

Cette grossière erreur est d’autant plus insupportable qu’elle arrive après plusieurs semaines très difficiles pour l’équipe, qui tente de garder le cap, dignement et refuse de s’exprimer sur le sujet. La conséquence est un  très gros mal être au travail pour les membres de cette équipe, qui se rendent compte qu’on peut absolument raconter tout et n’importe quoi sur leur travail!

Les représentants des salariés de Radio France, eux, ne peuvent rester silencieux. Le mépris et la violence avec laquelle cette émission est déplacée, soudainement, sans transparence auprès de l'ensemble de l'équipe, sont inacceptables. Si l’émission ne disparaît pas totalement, puisqu’elle trouvera une place le week-end, ce choix n’est ni celui de ses membres -autre  ineptie relayée par la presse- ni visiblement celui des auditeurs. Les milliers de courriels reçus par la médiatrice de Radio France depuis l’annonce de la déprogrammation de l’émission en témoignent. Et l’absence de justification claire pourrait donner raison à celles et ceux qui voient dans cette décision un geste politique.

 

Malaise systémique

Chaque année, les antennes peuvent évoluer, nul ne le conteste. Mais Radio France doit très sérieusement s’interroger sur la manière dont elle traite ses talents et de l’impact de sa communication sur la santé de toutes celles et ceux qui contribuent à la réussite de cette chaine. Les salariés de Radio France ont des droits, même quand ils sont injustement maintenus dans la précarité en CDDU. Avant de décréter qu’une émission « s’essouffle », il faut pouvoir en discuter suffisamment en amont avec les principaux intéressés. Un minimum de respect et de cohérence sont nécessaires. Déprogrammer un rendez-vous quotidien au nom de "choix éditoriaux", sans plus d'explication ou sous couvert d'arguments fallacieux, c'est aussi se moquer de notre public. Cette violence que subit aujourd’hui C’est encore nous concerne de nombreuses émissions ou tranches d’information à l’approche de l’été. Un malaise systémique qui doit cesser.

 

Paris, le 31 mai 2023

 

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