Depuis quelques années, nous entendons tout et n’importe quoi, sur le devenir de Radio France, le petit poucet, face au mastodonte France Télévision. Holding, fusion, absorption, disparition, la surenchère s’accélère de jour en jour.
Certains guettent les déclarations publiques des présidentes, des ministres, des députés, sénateurs concernant cette idée, un peu loufoque, de rapprochement de ces établissements publics sous une même bannière.
Essayons de faire le point sur ce maelstrom d’infos qui nous parviennent, depuis l’arrivée de Rachida. « N’ayez pas peur » -sic- Dati au ministère de la Culture.
Les protagonistes sont donc : Rachida Dati, notre Ministre à nous, Delphine Ernotte, Présidente de France TV, Céline Pigalle, Directrice de France Bleu et Sibyle Veil, notre Présidente.
A priori tout commence à Clermont-Ferrand avec un déplacement de Rachida Dati et Sibyle Veil à un festival du court-métrage. Ça sourit, ça serre des mains et puis ça balance comme le retranscrit le canard enchaîné :
R : Evoquons ce projet de fusion entre France 3 et France Bleu.
S : Euh … c’est un projet de Holding …
R : Ouais c’est pareil ! Tu ne vas pas me la faire à l’envers, Sibyle. Changer un nom, c’est rien du tout ! …
Ouais c’est chaud à Clermont !
Là-dessus, voulant reprendre la main, notre bonne Présidente demande à Céline d’annoncer sur France Bleu Berry un changement de nom pour ICI … « mais pas tout de suite. D’abord il faut faire un grand plan de communication ».
Et on découvre le même jour un échéancier avec des dates dès le printemps 2024.
Bon, c’est vrai, nous, à Radio France, nous sommes habitués aux annonces pas toujours suivies d’effet !
Suite du feuilleton : début mars, Dati est de retour aux affaires. Mais pas toute seule.
Elle a sous le bras une pile de dossiers. Celui de Franck Riester, revenant post-Covid, qui a lancé un chantier poursuivi par Laurent Lafon, avec sa proposition de loi « relative à la réforme de l’audiovisuel » adoptée le 13 juin 2023 au Sénat. Également celui de Laurent Bataillon et Jean-Jacques Gaultier députés qui présentent un rapport prônant, comme le précédent document : « une holding » de l’audiovisuel public.
D’ailleurs, il est bon de préciser que pour eux, l'Audiovisuel public regroupe France Télévision, Radio France, France Média Monde (France 24 et TV5 Monde), l’INA et Arte.
Bref Dati annonce vouloir aller très vite pour créer cette holding.
Ça tombe bien, quelques jours plus tard Delphine Ernotte (l’ennemie jurée de Sibyle, et aussi un peu la fayotte de la classe, en fin de mandat) ajoute : “Je soutiens intégralement le projet de Holding !”. Clairement, il s’agit d’une déclaration de guerre sous forme d’OPA hostile.
Bon, il faut simplement se souvenir qu’après l’abandon du projet de Riester, qui lui voulait une « fusion », la présidente de FTV avait annoncé sa candidature à la tête de la holding, terme apparu peu de temps après le confinement, toujours dans ce projet de « rassemblement, mais chacun chez soi ».
A noter que chaque protagoniste (députés, sénateurs et ministres), relève une faille dans le déroulement rapide souhaité par Dati : le financement de l’audiovisuel public n’est pas pérenne actuellement.
Après l’arrêt de la redevance, cela fait désormais 2 ans que notre budget est une affectation d’une part de la TVA, ce qui le fragilise notoirement.
En attendant, le rouleau compresseur est en marche :
Delphine Ernotte a annoncé le mois dernier en CSE central de FTV un projet éditorial commun RF/FTV entre les rédactions de France Info radio / web / télé qui ne feraient plus qu’une. La direction de Radio France ne dit pas le contraire.
Le bouquet suivant est bien évidemment celui qui rassemble France Bleu et France 3 au travers d’Ici et qui devait éclore ce printemps. La floraison sera plus tardive puisque repoussée à l’automne. Quelques soucis restent encore à régler : le propriétaire de “ici.fr” ne veut pas vendre son nom de domaine (c’est un mandataire automobile) et France 3 souhaite devenir “Ici” uniquement pour ses programmes régionaux !
Malgré le retard à l’allumage tout cela a déjà été écrit. Il figure dans un document qui avait fuité l’an dernier et qui avait déjà suscité un CSE Central Extraordinaire dans lequel la Présidente de Radio France s’était défendue en soutenant que ce n’était même pas un projet mais juste une réflexion, des pistes à travailler … Peu convainquant !
Rachida Dati souhaite que l’affaire soit pliée avant la fin de l’année et que la holding soit sur les rails au 1er janvier 2025.
Après le positionnement très clair de Delphine Ernotte, tout le monde attendait la contre-attaque de Sibyle Veil. C’est fait depuis dimanche 17 mars dans la Tribune Dimanche. Oui, Madame Veil “une fusion de l’audiovisuel public affaiblirait la radio”. Nous n’avons pas la même vision de la radio que la Présidente, mais nous la soutenons quand elle dit que “pour additionner des forces, il faut préserver ces forces”.
Nous sentons la tempête poindre au loin, il faut se tenir prêt à affronter la houle. SUD Radio France sera au côté de tous les personnels de Radio France pour défendre notre entreprise de toutes les tentatives de déstabilisation. Espérons l’union sacrée dans ce combat car nous sommes tous dans le même bateau.
La pseudo « négociation » sur les salaires tenue en début d’année illustre parfaitement la situation actuelle à Radio France. Non seulement la Direction est arrivée avec une enveloppe vide (on a l’habitude) malgré un contexte inflationniste persistant, mais en plus elle installe un chantage absolument insupportable (et inédit).
SUD, vent debout contre cette provocation, manifeste sa réprobation et s’attend à la même virulence autour de la table. Surprise : la réaction des OS est… modérée. La plupart commencent à discuter des détails. La réunion se poursuit dans une certaine confusion : les provocations du directeur du « développement social » (terme utilisé car celui de dialogue social était impropre depuis longtemps) s’ajoutant aux approximations sur le chiffrage du fameux geste.
Là encore, fait totalement inédit, la direction a dégainé un PV de désaccord sans avoir soumis de proposition de texte à signer. Elle a considéré que notre opposition affichée en séance valait une non-signature. Absurde ! Encore plus fort, ce PV étant truffé d’erreurs, une V2 est arrivée rapidement, qui a été mis à la signature (ne riez pas). Mettons fin au suspens, SUD n’a pas signé un texte qui indique qu’un précédent texte n’a pas été signé. Nous attendons impatiemment le prochain PV de désaccord portant sur le PV de désaccord !
Passons les détails des différents épisodes intermédiaires, il faut juste savoir que la direction a fait preuve d’un amateurisme confondant dans le calcul de l’impact sur l’enveloppe CSC/CPS. Plusieurs versions ont circulé, jusqu’à l’ouverture des séances. Là, on apprend que l’enveloppe globale est réduite d’un tiers. En revanche, les mesures au choix (au libre arbitre de la direction hors de toute discussion) sont à peine touchées. Pour les PTA nous aurons donc 244 mesures (chiffre étrange, comme si une mesure pour un.e chargé.e.s d’accueil valait une mesure pour un.e chef.fe de service) dont seulement 49 discutées avec les syndicats, les autres étant actées à l’ouverture par la direction. L’enveloppe journalistes est elle aussi réduite d’un tiers, comme pour les PARL pour lesquelles seront attribuées 37 mesures au total (même pas une par locale). Des miettes !
Pour conclure sur le fameux geste en faveur des bas salaires, il s’accompagne d’un autre geste pour l’ensemble qu’il serait trop vulgaire de décrire mais qui se forme avec le doigt central.
Ne nous trompons pas, nous soutenons la priorité donnée aux bas salaires, mais il faut pour cela une enveloppe spécifique et non sacrifier les progressions salariales de tous.
Au constat de l’absence de politique salariale à Radio France s’ajoute désormais une volonté de démolir le NAC tout en déstabilisant les mécanismes d’accompagnement des carrières. Et pendant ce temps, l’inflation poursuit sa courbe…
*l’amour des acronymes n’empêche pas de les définir. NAO = Négociation Annuelle Obligatoire (sur les salaires). CSC = Commission de Suivi de Carrières. Elles ont succédé aux CPS car la direction déteste le paritarisme qu’elle assimile à un gros mot !
La période actuelle est très trouble, pour ne pas dire tendue.
Avec la trajectoire budgétaire annoncée par la Ministre, nous tentons tous d'y lire les signes positifs, de confiance, d'encouragement dans nos missions.
Pourtant, les salariés sont extrêmement inquiets. Car la clé, c'est bien le projet d'entreprise sur les prochaines années. Clairement les salariés pensent que ce projet se prépare sans eux et contre eux.
La réalité à laquelle les salariés font face, c'est la baisse de la production, les difficultés à recruter et à maintenir la confiance des plus jeunes - quand il ne s'agit pas tout simplement d'éviter qu'ils ne partent, les incertitudes sur France Bleu, les réorganisations, à la documentation, sur le numérique, à la RH, à la direction de l'établissement, j'en passe. Sur Bleu, les annonces récentes entérinent ce qui nous était présenté comme projet à débattre. Encore une fois, on nous met devant le fait accompli.
Vous (la direction) mettez en avant la grande consultation pour nous dire l’enthousiasme et la confiance des salariés, mais nous sommes loin d'une majorité et à chaque fois que vous vous appuyez dessus, cela créé une tension. La plus grande partie des salariés, qui eux sont inquiets, se demande où sont et qui sont ces salariés qui vont, semble-t-il, si bien.
Aujourd'hui, nous commençons la négociation sur la GEPP (Gestion des Emplois et des Parcours Professionnels). Mais on observe un gel des recrutements dans de nombreux secteurs et on se dit qu'un tsunami sur nos métiers se prépare. Pire, que tout est déjà écrit et qu’on va faire face à un nouveau rouleau compresseur. Vous nous parlez déjà d’employabilité, d’adaptation des salariés à des évolutions dont on ne nous dit pas l’ampleur.
L'inquiétude est donc là, partout. La notion de « part variable » dans nos budgets à l’avenir renvoie forcément à des objectifs qui y seront liés. Nous serons très attentifs aux présentations des projets de COM et projet stratégique.
Après 4 réunions de négociation sur le métier de chargées d’accueil du réseau France Bleu, le sujet avance… doucement… et pas dans le bon sens !
A peine entamée il y a des années et rangée au placard par la direction, cette négociation afin de réviser cet emploi réapparait à la faveur de la présentation de la stratégie numérique à France Bleu, qui s’appuie en partie sur les chargées d’accueil.
SUD y a vu l’opportunité de faire avancer un chantier colossal tant les attentes sont grandes, notamment suite aux évolutions du métier et des tâches remplies par les CA, dont certaines n’ont absolument rien à voir avec ce pour quoi elles ont été recrutées.
Un recensement de toutes ces tâches demandées au gré des appétences, des besoins mais aussi des injonctions des directions en radios locales a été nécessaire. L’éventail est large : cela va des missions habituelles au montage audio et même vidéo en passant par la production de pages web et de publications sur les réseaux sociaux.
Les organisations syndicales ont milité pour dissocier les missions de base et les compétences nécessaires pour les accomplir des missions supplémentaires qui nécessitent des compétences complémentaires, avec des fiches de postes précises, sans oublier les formations indispensables.
Si les tâches « hors accueil » ont été pérennisées pour intégrer les activités numériques, elles ne seront pas obligatoires si le.la chargée d’accueil n’en a pas les compétences, ni le souhait. Elles se feront hors temps d’antenne locale. Nous alertons alors sur le risque de chargées d’accueil à deux vitesses !
Malgré un engagement initial à réévaluer l’organisation du temps de travail (il s’agissait clairement de supprimer la modulation), la direction a édifié la modulation comme principe nécessaire à l’accomplissement du travail des chargées d’accueil. Première déception !
Les chargées d’accueil sont pour la grande majorité à temps partiel subi, cette modulation empêche de compléter son activité avec un autre emploi.
Toujours plus inquiétant : au gré des départs de l’entreprise des salarié.e.s à temps plein, la direction souhaite recruter des chargées d’accueil à 80% maximum afin d’atteindre 3 x 0,8 ETP, soit 2,4 ETP (2,7 sur les ultras urbaines), sans compter les 0,3 ETP gestion.
Enfin, le coup de grâce : la revalorisation salariale ! Le grand espoir pour ces bas-salaires s’effondre. Dans sa grande générosité, la direction lâcherait 2 paliers (soit 3%) pour celles qui prendraient en charge les tâches numériques, rien pour les autres. L'aumône !
Suite et fin lors de la dernière négociation (ou pas ?), dont la prochaine date est fixée le 21 mars, ou aurons-nous un nouveau 49.3 de la direction dont la nouvelle stratégie consiste à conclure les négociations par des mesures unilatérales (cf NAO). Il y a de quoi s’inquiéter !
Élections professionnelles : le scrutin du 2nd tour est ouvert.
Vous pouvez voter jusqu’au lundi 10 juillet 2023 à 14h30.
Mis en route à l’automne 2020, l’accord emploi RF 2022 qui se voulait être un « nouveau départ pour Radio France » s’est avéré à terme un fiasco total !
Le but affiché était de réorganiser l’entreprise tout en maintenant les activités radiophoniques et musicales, en développant les activités et les productions numériques, en préservant les conditions de travail, en luttant contre les Risques Psycho Sociaux et en réduisant la précarité.
La direction s’était engagée sur les recrutements, sur le développement des parcours professionnels et de la formation et sur la transmission des savoirs.
Il fut une époque pas si lointaine où, sous couvert de bienveillance, toutes les dérives étaient possibles à Radio France : conflit d’intérêt, sexisme ordinaire, harcèlement, voire agression sexuelle étaient largement couverts par une direction négligente ou complice. Nous savons malheureusement aujourd’hui que des bourreaux ont sévit très longuement, le plus souvent protégés par leur position hiérarchique, leurs relations ou leur statut de “star de la radio”, la direction n’entendait alors que rarement la parole des victimes.
Lire la suite : Processus disciplinaire : des sanctions au bazooka
Ce jeudi 21 avril, au cours d’un CSE Central extraordinaire, la Présidente a présenté un grand projet d’évolution de France Bleu dont l’intitulé fait frissonner : « renforcer le local avec l’appui du territoire et renforcer sa présence sur le numérique ».
Nous imaginions bien que le rapport ISAST, imposé par les CSE de région via la justice, pouvait servir de marchepied à une réorganisation profonde du réseau, l’audit du cabinet Colombus aura permis d’en poser les bases. Ce projet en est l’expression.
Son aboutissement est la suppression pure et simple des CSE régionaux, seuls garants d’un dialogue social de proximité. Contestant toujours celle-ci, les élus du CSE Central des Organisations syndicales SUD, CGT, CFDT et SNJ ont établi la déclaration suivante :
Lire la suite : Projet stratégique France Bleu : loin de rassurer les salariés
Lundi 27 mars aura lieu une audience devant le Tribunal Judiciaire pour entendre les arguments des 5 Organisations Syndicales Représentatives contestant le périmètre des CSE que la direction veut imposer. D’un côté FO qui demande un CSE unique, de l’autre CFDT, CGT, SNJ et SUD qui réclament des CSE au plus près des stations locales. En face, la Direction de Radio France veut imposer un CSE France Bleu (tiens, tiens, comme France TV, étonnant, non ?) et un CSE autre (tout le reste, même les salariés en région qui travaillent pour d’autres chaines ou directions).
Lire la suite : Elections professionnelles : la direction dans le déni
A l’instar de l’ensemble des salarié-es de la maison, le préjudice salarial fait aux musiciens est devenu insoutenable. Et ce n’est pas la mesure salariale obtenue lors de la NAO (Négociation Annuelle Obligatoire), avec une date d’effet à partir de cette année, qui va enrayer la dégringolade des revenus et résoudre la perte d’attractivité des formations musicales observée depuis plusieurs années. Dans le cas d’un jeune musicien qui réussit à intégrer aujourd’hui Radio France, il percevra l’équivalent d’un mois de salaire en moins sur une année de revenus par rapport à 2017 (en prenant l’inflation en compte). Les musiciens ont un système salarial qui leur est propre, basé sur l’ancienneté, mais qui ne permet aucune autre évolution de la rémunération, fixant strictement toute perspective salariale (là où les CSC et CPS constituent pour les PTA, journalistes et PARLs un cadre d’échange supplémentaires sur les évolutions salariales individuelles).
Sibyle Veil a été reconduite pour un second mandat à la tête de Radio France.
Dès le 2 janvier, SUD Radio France écrivait au DRH au sujet du calendrier social à définir :
« Madame Veil ayant vu son mandat à la présidence de Radio France renouvelé, nous vous interrogeons sur les conséquences de son projet. De nombreuses propositions attirent notre attention, comme par exemple :
Lire la suite : Nouveau mandat de Sibyle Veil – Un projet préoccupant
Les élections professionnelles devaient avoir lieu cet hiver, afin de renouveler l’ensemble des élu-es et représentant-es des salarié-es (CSE, CSSCT, RdP).
Les négociations liées à l’organisation de ces élections ont démarré juste avant l’été 2022.
Tout de suite, la volonté de la Direction a été claire : porter une nouvelle attaque sur les instances en réduisant drastiquement le nombre d’élus, en s’attaquant notamment très durement aux régions.
Lire la suite : Elections professionnelles à Radio France – Le bras de fer est engagé